dimanche 26 janvier 2014

Little Rock, Arkansas

L'automne dernier, le boulot m'avait envoyé à Little Rock pour une conférence. A priori pas une destination de rêve. Disons que je ne m'attendais pas à ce que ce soit plus cool que Baton Rouge. J'avais même lu que, comme nous, c'était une des villes les plus dangereuses des Etats-Unis, avec dans les ghettos qui se sont formés autour de la ville, problèmes de gang, meurtres, viols et compagnie au quotidien. Au final, j'avais été plutôt agréablement surprise. Au moins la capitale de l'Arkansas se paye quelques tours digne d'un centre ville et même un joli tramway et une passerelle piétonne qui traversent la rivière! On a encore du boulot dans notre capitale louisianaise...




 

mardi 21 janvier 2014

Différences culturelles // n*1: Implicite et explicite


Quelle vaste tâche de parler des différences culturelles! J’ai regroupé tellement de sujets à évoquer, essayé de faire des catégories moi-même, pour y aller par petit bouts. Et puis on se rend vite compte que chaque petit bout explique un autre petit bout, et ça devient vite super compliqué à mettre en ordre! Alors je me suis rappelée ce super bouquin de Pascal Baudry, Français et Américains, l’Autre Rive, que j’ai d’ailleurs recommandé à de nombreuses personnes. Mais je suis à peu près sure que personne ne s’est encore lancé dedans, alors pour me faciliter la tâche, je vais me servir de son approche à lui. Et je vais vous copier beaucoup de ce qu’il explique lui, puisque c’est déjà parfaitement bien fait. Après tout, ça sert à rien de ré-inventer la roue.  

La société américaine est explicite, contrairement à la France qui est un pays de communication implicite. En France beaucoup de choses ne se disent pas, elles sont sous-entendues, alors que les ricains sont super directs. “Pour pouvoir assimiler en quelque deux siècles, dans un pays aussi étendu que l’Europe, des millions d’étrangers, dont beaucoup ne maitrisaient pas la langue, il a fallu établir une culture où l’on peut poser une question quand on ne sait pas, sans être jugé sur le fait même d’avoir posé cette question ou sur la façon dont on l’a posée, et s’attendre à recevoir une réponse vraie, formulée au même niveau que la question posée, de manière à pouvoir agir efficacement aussitôt.” 

La honte de devoir lever la main en classe, ou partout ailleurs, pour demander un truc, c’est qu’à moi que ça rappelle des choses?

“De plus, les Pères fondateurs de la nation américaine ont voulu prendre le contre-pied de la culture régalienne anglaise, avec sa verticalité et ses abus. Pour ce faire, ils ont mis en place un système de checks and balances, c’est-a-dire un ensemble de procédures qui empêchent qu’une quelconque des trois branches de gouvernment puisse exercer un pouvoir excessif; ce système repose sur une grande transparence et nécessite donc un effort constant d’explicitation. Ainsi, partant d’une culture anglaise très orientée vers l’implicite, aboutit-on à l’une des cultures les plus explicites de la planète. A l’inverse, une culture ancienne, apparemment non favorable à l’assimilation d’étrangers, pourra se payer le luxe de vous juger sur la question posée (nature et qualité, mode d’expression, pertinence contextuelle, inférence sur votre niveau de maîtrise, etc.), de ne pas situer sa réponse au niveau de la question posée, de répondre avec des sous-entendus critiques ou moqueurs, voire de ne pas répondre du tout. On fera ainsi sentir a l’étranger qu’il doit en quelque sorte gagner le droit d’entrer dans la culture française, ce qui s’obtiendra par une maîtrise progressive des règles tacites, l’amenant – progressivement et à ses risque et périls – à comprendre la culture de l’intérieur puis à se comporter comme les autochtones, y compris dans la non-explication des règles a l’égard de ceux qui n’ont pas déjà été initiés.”

Pascal Baudry explique aussi que comme dans la norme implicite française, il y a un décalage entre ce qui est dit et ce qui est signifié, il vient se loger entre les deux un tas de trucs (allusion, référence historique partagée, désir, risque de malentendu, etc.) Du  coup, dans la communication, le contexte est plus important que le contenu. A l'inverse, aux US, les choses sont toujours expliquées dans le détail. A un point que desfois ça parait ridicule (du point de vue d'un Français, qui va croire qu'on le prend pour un imbécile).

De cette différence d'importance pour le contexte et le contenu, on retrouve, au delà du domaine de la communication, tout un tas de disparités... du type:
  • Les Français portent plus d’attention au cadre de travail, alors que les Américains peuvent bosser des heures dans des bureaux sans fenêtres;
  • Les Américains utilisent des phrases courtes qui vont droit au but. Moi, je me souviens encore de l’art de broder des phrases de quatres lignes qui servent a rien pendant toute ma scolarité;
  • En France on met des jolis monuments dans les villes, on enterrent les fils électriques. En Amérique, on aiment bien les feux rouges qui pendouillent au milieu du carrefour, on te met des panneaux d’affichage monstres partout pour être sûr de bien passer le message, et on construit des plans de villes en damier quelque soit le relief. 


San Francisco

Chez les Américains c’est tout blanc ou tout noir, il y a les bons, et les méchants, et pas trop de nuance entre les deux. Si ça rentre pas dans une case ça dérange, alors que chez nous tout est beaucoup plus nuancé. Il est bien connu que les français aiment bien philosopher, et théorisent TOUT. En revanche, les ricains sont super pragmatiques, et du coup ça les rendrait plus efficaces. Enfin ça, d'un point de vue français, ça se discute... Parce que, très souvent, voilà leur manque de sens critique! Si c’est pas mauvais, c’est Good et vice versa. Alors ça donne des résultats plus vite, oui, mais toujours les bons? Mais bon, justement je vais pas philosopher là-dessus! Je sais, en tous cas, que j’en ai fais chier plus d’un avec ma théorie à la française. Pour un ricain, une proposition est soit vraie, soit fausse. La phrase type “Oui, mais…” ou “Non, mais…” ça les rend fous! Nous les français, on joue beaucoup dans les nuances de gris… Eux, préfèrent aller plus efficacement vers l’action.

“De tout cela, il résulte que le Français sera plus attiré par le complexe, et l’Américain par le simple.”



Pour finir, je vais encore une fois citer le bouquin, parce que c’est tellement bourré d’info que je peux pas m’arrêter: “Le français ne fut pas pendant plusieurs siècles la langue des cours d’Europe parce que ce serait la langue la plus précise, comme on a voulu le faire croire, mais parce que c’est la langue qui permet d’être le plus précisément imprécis.”